Tuesday, 30 September 2008

Ò, nuit de mes amours

ô, nuit de mes amours,
tu ne fais que te plaindre de ta vie
qui est, dis-tu, d'une effroyable tristesse,
mais que pour rien au monde, 
tu ne l'échangerais contre une autre.
et moi je ne fais que me plaindre de ma vie
qui est d'une incroyable tristesse,
que je serais prêt à tout pour l'échanger contre la tienne,
vivre ta vie et ta tristesse pour te donner la joie
et transfigurer tes souffrances en plaisir.

Ma vie sans toi n'est que détresse et désespoir,
une nuit sans lune, un jour sans soleil,
toutes mes nuits je ne rêve que de toi
et mes jours se passent à rêver de mes nuits avec toi.

à combien se mesure la distance entre toi et moi
et combien de mers et de terres devrais-je
encore traverser pour te retrouver

Où s'arrête la route, où commence le chagrin
Où finit le chagrin et commencent les larmes
Où finissent les larmes pour que je découvre les charmes
De la vierge qui est née pour ne jamais aimer.

L'amour, cette inconnue, est venue jusqu'à moi
mais je n'ai pu la reconnaitre,
aveuglée que j'étais par toute sa beauté.
Je ne l'ai alors saisie que lorsqu'elle était déjà loin
et j'ai couru pour à son souffle boire
et mourir dans cette nuit si noire.

©2008 Marwan Elkhoury

Sunday, 28 September 2008

Un seul être me manque

Un seul être me manque
Et tout est dépeuplé.
Un seul être me manque
Et tout est repeuplé.

L'amour charnel
Est esclave du réel
Il obéit aux mêmes lois
De la géométrie des poids.

Attiré vers le bas,
Magnétisé par le vide,
Il tombe, à grands fracas,
En se fracassant sur les sols hostiles.

Nous jouons le jeu de l'amour
Pour mieux le feindre
S'en donner l'illusion.
Mais si, par malheur, il nous touchait,
Nous serions brûlés
Par le feu d'une passion incontrôlée.

Chacun est ombre et ombre de lui-même.
Tout n'est qu'illusion
Dans un monde qui n'existe plus,
Un monde qui n'est plus
Que la trace de sa création
Des milliers d'années-lumière en amont.

Tout, un jour, fut.
Tout ce qui fut, fut.
Plus rien n'est.
Ni moi, ni toi,
Ni amour, ni création,
Ni onde, ni monde.

Rien ne sert de se chercher
L'autre en soi-même
Ou soi-même en l'autre
Il faut se perdre à point.

©2008 Marwan Elkhoury

Friday, 26 September 2008

Ce qui est n'est pas

Ce qui est n'est pas
Car à peine il est il n'est plus.
Comment faire alors pour que ce qui n'est pas
Soit avant qu'il ne soit plus
Il faut pouvoir le décrire
Dans la pleine plénitude de son instantanéité
Avant l'effondrement immanent de sa fragile immensité.

Il faut pouvoir décrire le jour
Avant que l'ombre de la nuit ne l'efface
Décrire la couleur du ciel changeant,
Des nuages flottants et des astres filants,
Peindre le visage mouvant d'une personne amie
Avant que les traits de sa face
Ne se transforment dans l'inclinaison du temps.

Rien ne se tient, rien ne dure,
Tout ce qui s'écroule est ce qui perdure
Comme nos amours ou nos transes,
Qui ne durent que le temps d'une danse.

©2008 Marwan Elkhoury

Mon oeil



De mon oeil droit, je vois à peine de loin
De mon oeil gauche, je vois à peine de près,
Entre ces deux réalités, mes yeux balancent,
Et entre les deux, je ne m'accorde sur rien.

De près comme de loin, je n'y vois goutte
Et si je devais y voir, je n'en saurais quoi dire
Entre ce que je vois et ce qui est, il est des mondes,
Entre le voir et le dire, il en est d'autres encore,
Et de ces mondes, j'en invente d'autres encore.

Je ne connais de réalité que celle que je pressens
A l'intérieur de moi-même,
Et celle qui existe en dehors de moi,
Est encore celle qui existe en moi.

Que sais-je de ce qui est,
En dehors de moi ou en moi,
Je n'en connais que ce que j'en ressens
De douleur ou de plaisir,
De couleurs ou de désirs.

A quoi me sert-il de vivre alors
Si je ne peux connaitre ce qui est
Ni être ce que je suis.

De toute manière qui vous demande
Un avis. Vous êtes créé.
Un point c'est tout.

N'est-ce point assez d'être.
Vous auriez très bien pu ne jamais l'être.
Un tel cadeau tombé du ciel
Vaut bien toutes les saveurs du fiel.

©2008 Marwan Elkhoury
©2008 Dessin Dounia

Thursday, 25 September 2008

Entre le blanc et le noir

Entre le blanc et le noir,
Entre la vie et la mort,
Entre l'amour et la haine,
Entre la paix et la guerre,
Mon corps balance.

Entre soleil et nuit,
Entre lumière et obscurité,
Entre respiration et expiration,
Tremblements et scintillements,
Ma vie, dans le blanc, s'épanouit,
Et dans le noir de la mort s'anéantit,
Aboutissement, étincellements, anéantissement.

Entre le blanc et le noir,
Toutes la palette des couleurs de l'arc-en-ciel
Se profilent et se superposent devant moi,
En une blanche lumière couleur soleil,
Qui aveugle le monde de son ombre,
Jusqu'au noir qui nous couvre de ses reflets sombres.

Des bleus qui nous donnent froid au dos,
Aux rouges qui nous effarouchent,
En passant par les verts qui nous calment,
Du blanc, du bleu, du vert, du rouge et du noir,
Tout n'est qu'explosions calmes,
Tranquilles chaos et immenses voluptés.

C'est dans cette lumière aveuglante,
Que je commence et que je finis de voir,
Tout ce qu'il y a à voir du monde visible,
Sans pour autant pouvoir voir
Ce qui dépasse l'entendement,
L'univers dans son ensemble,
Des ultraviolets aux infrarouges.

©2008 Marwan Elkhoury

Sunday, 21 September 2008

Entre rêve et réalité


Entre rêve et réalité,
Entre le vrai et le faux,
Entre la vie et la mort,
Y a-t-il vie ou y a-t-il mort,
Y a-t-il l’espace d’un espace,
Y a-t-il le temps pour le temps d’un espace,
Et l’espace du temps,
L’espace du rêve sans la réalité,
L’espace du réel dans le rêve,
Et le rêve dans le rêve,
Rien qu’un rêve d’un réel rêvé,
L’espace d’être et d’avoir
Un espace pour moi et pour toi,
Un espace pour nous tous, pourquoi pas,
Un espace pour un bonheur sans malheur,
Un espace pour vivre sans mensonges,
Un espace pour vivre le temps de vivre
Des espaces assez larges pour nous contenir
Contenir nos rêves sans nos cauchemars
Tous nos désirs et nos plaisirs,
L’espace de nos amours sans nos haines,
Un espace pour les larmes,
Larmes de joie comme tristesse de la joie.

Si nous avions le temps de vivre,
Saurions-nous le prendre,
Ou toujours le laisser pendre
Comme un pendu à sa corde, de rêve ivre.

Sommes-nous vrais ou sommes-nous faux,
Sommes-nous tout simplement
Le rêve d’un autre, ou sa réalité,
Cet autre qui s’ennuie là-haut tout en haut,
Ou un quelconque autre entre lui et nous,
Qui s’amuse à nous rêver,
À nous rêver rêvant, à nous rêver souffrant,
À nous rêver pleurant et mourant,

Sommes-nous sans cesse tenus,
D’accepter d’être sans être,
De ne pas être en étant,
Être lui sans être nous,
Ou n’être pas du tout,
Donner à survivre, donner à subir,
Donner à la cause à cause
Que nous n’en sommes pas dignes
Ni d’être ni de ne pas être.

©2008 Marwan Elkhoury
©2008 Dessin Dounia

Friday, 19 September 2008

La cour et la basse-cour



Nous regardons passer le train de la vie
A toute vitesse devant nous et sans avis
Sans même savoir ce qui se passe
Ou ce qui ne se passe pas,
Pour qui et pourquoi ça se passe
Sans même avoir la moindre notion
De ce qui pourrait se passer,
Ne rien savoir de nos antécédents,
Avec ou sans précédents et des suivants.

Quelle différence, dîtes-moi, entre nous
Les cochons, les rats, les vaches et les poules,
Qui vivent sans même se demander ce qu'est la vie,
Qui, contrairement à nous, vivent
Sans se poser les questions vitales
Nous vivons, les uns comme les autres,
Dans une inconscience de la vie totale
Ignorant tout ce qui fut, ce qui est et ce qui sera,
Qui nous sommes et ce que nous serons.

Si la matière ne forme que 4 pour cent de toute l'immensité,
Mais, dîtes-moi, comment, au fait, le savons-nous,
Ne sachant rien des 96 pour cent restants
Et que de ce, mettons, 4 pour cent supposé connue de réalité ,
Nous n'en connaissions que les 25 ou 50 pour cent,
Ce qui serait, à elle seule une gageure véritable ,
Notre connaissance, au mieux, consisterait,
A un, ou, au mieux, deux pour cent
De l'ensemble du possible et de l'impossible,
En fait, que savons-nous de ce qu'il y a à savoir,
Et que savons-nous de ce que nous ne savons pas.

Toutefois, nous vivons comme si nous avions,
De A à Z, saisi le principal et les intérêts,
Comme si nous savions nous diriger,
Vers où nous allions,
Et le comment du pourquoi.
D'ailleurs, dans le cas contraire,
Aurions-nous été capable, un seul instant,
Dirais-je, de vivre l'instant,
Si nous en avions, rien qu'un instant,
Une conscience délirante.

©2008 Marwan Elkhoury
©2008 Dessin Dounia

Sunday, 14 September 2008

Partir loin, très loin


Je voudrais partir loin, très loin,
Aller, oui, pourquoi pas, jusqu’au bout du monde.
Mais comme la terre est ronde,
Et le temps circulaire, le bout du monde
N'est rien d'autre que mon point de départ,
Là où a commencé ma ronde
Là où finira mon tour du monde.

Pas besoin d’aller bien loin
Traverser terres et mers,
En bravant tous les dangers
Et revenir au même point.
Dés lors, qu'il suffirait de faire du sur place
Pour traverser l’immensité de la place.

C’est le chemin, me dit-on,
Qui compte, le but du voyage,
Non, le point de chute mais les beaux paysages.
Ce sont les gens qu’on rencontre
Qui comptent, non ce qu’ils me montrent.

Le seul chemin dans lequel on s’engage
Est le chemin de sa propre image
Les seuls gens que l’on rencontre
Sont ceux-là qu’on aperçoit en-deça de notre ombre.

©2008 Marwan Elkhoury

Je brûle mes mots au feu

Je jette aux orties mes mots
Qui n’arrivent pas à suivre mes maux
Que voulais-je dire en les disant.
Rien. Un instant leur échapper en les séduisant.

Je jette mes mots aux cochons
Pour qu’ils s’imaginent y trouver des perles rares
Quand je sais pertinemment ce que sont mes tares
Encore faut-il les faire passer par où nous penchons.

J'ai mis mes mots à la mer
Non pour espérer que quiconque les recueille
Plutôt pour qu’ils ne puissent franchir les écueils
De ma pensée absconse et amère.

Je brûle mes mots au feu
Les offrir en offrande aux dieux
Pour qu’ils durcissent auprès d’eux
Et soient sensibles à mes derniers vœux.

Si les mots ne réchauffent pas plus
Que nos maux ne nous damnent
Pourquoi les laisser subtiliser nos âmes
Quand ils ne peuvent être tribut pour les exclus.

©2008 Marwan Elkhoury

Friday, 12 September 2008

La Particularité Divine



Créateur des particules modèles
En s'annihilissant aussitôt créées
Résultait d'une disparition instantanée
N'était la brisure spontanée qui sauva le modèle.

Le monde qui devait être créé
Hanté par l’amour universel
Le contraignait dans l'unique particule immatérielle.

Cette consigne fut détournée par une explosion de matière,
Émanant d’une explosion simultanée d’énergies
Rudimentaires et de particules élémentaires,
Nuées de soleils et de galaxies merveilleuses.

L’évanescent amour de nos liaisons dangereuses
Honteuses relations asymétriques
Curieuse coïncidence d’incidences bienheureuses.

Cette quête de l’absolu
Entre matière et anti-matière
Raccourcis d’une infime dissymétrie
N’aboutit qu’à prôner une confusion innatendue.

La particularité divine de nos amours perdus
Hier comme aujourd’hui
Créa dans le collimateur, 
Comédies, drames et tragédies.

Cinétique énergie de nos corps en mouvement
Élusive particule déterminant le tout
Refroidissant l’univers pour réchauffer nos âmes damnées
Nous nous sommes formés dans une faille du système universel
Par la tragique faute d'un dieu inattentionné.

Ces lois fondamentales qui s'ingérèrent dans la geste divine
Entrent dans la construction de nos amours dénaturés
Rien n’est égal
Nul n’aurait dû l'être.

Le champ qui emplit l’univers
Héros de l’humble démiurge
Constamment nous bombarde de particules fondamentales.

Cantique des cantiques des énergies sombres
Et trous noirs de nos cauchemars de l'ombre
Revivre une fois le big-bang avant de périr
Nul ne se rappelle l'explosion d'energie quantique.

Légère faute au départ
Hormis quelques erreurs de frappe
Comme seul un dieu peut les réussir.

Chants d'amours célestes
Enfantèrent heurts et bonheurs.
Rien n’aurait dû être
Ni expansion ni dilatation que disparition.

Le monde est fait de milliards de milliards de ces petites pièces
Hélas, chaque pièce ayant son histoire
Comment recomposer le tout à partir de la somme de chacune.

Comment recomposer nos amours décomposés
En amour comme dans l’espace
Rien ne sert de contempler ces traces
Narcissique miroir de l’univers métamorphosé.

Lumière des soleils qui tout engendra
Heureuse enfance perdue dans des rêves d’espaces infinis
Curieuses pensées d’au-delà éloignés.

Comme toutes ces étoiles et ces galaxies
Energie et masses se retrouvent
Ruines et brisures spontanées
Nieront l’unité pour inventer la profusion du monde.

©2008 Marwan Elkhoury
©CERN Photo: Simulation de détection du boson de Higgs dans l'expérience CMS;

Wednesday, 10 September 2008

Je t'aime tu m'aimes


Je t’aime
Un peu, beaucoup, pas du tout, à la folie.
Comment t’aimer, saurais-je t'aimer, le saurais-tu ?
Tu m’aimes,
Un peu, beaucoup, pas du tout, à la folie.
Comment m’aimer, saurais-tu m'aimer, le saurais-je ?

J’aurais voulu t’aimer
Tu aurais voulu m’aimer
J’aurais voulu que tu m’aimes comme je t’aime
Tu aurais voulu que je t’aime comme tu m’aimes.
Combien m’aimes-tu ?
Un peu, beaucoup, pas du tout, à la folie.

M’aimes-tu ?
Pas de réponse.
Question sans réponse.
Ton ‘pas de réponse’ résonne de réponses
Ton ‘pas de réponse’ est de toutes les réponses
De celles que tu m’as données
Sans doute, la seule, la meilleure que tu aies pu me donner.

Voyons, repassons un peu les faits ensemble …
Ou … chacun tout seul.
Je t’aime, un peu, beaucoup, à la folie, pas du tout,
Beaucoup.
Tu m’aimes, un peu, beaucoup, à la folie, pas du tout,
Pas du tout.

J'ai demandé aux marguerites
de me dicter les rites.
C’est triste !
Non. C’est la vie !

©2008 Marwan Elkhoury
©2008 Dessin Dounia

Monday, 8 September 2008

Le dilemme du prisonnier

Moi, je t'aime et te jure que toujours je t'aimerai
Toi, tu m'aimes et me jure que toujours tu m'aimerais
Tu avais promis de toujours m’aimer
Comme j’avais promis de toujours t’aimer.

Aussitôt dit, aussitôt fait, tu courrais en aimer un autre,
Faisant semblant de toujours m’aimer.
Et moi de courir en aimer une autre,
Faisant semblant de toujours t’aimer.
L’autre, promettant de t’aimer, en aimait un autre,
Qui en aimait une autre, promettant de l’aimer.

De fil en aiguille et au fil des jours,
A chaque nouveau tour de vis, à chacun d’en aimer un autre,
Tout en prétendant s’aimer l’un l’autre pour toujours,
Et, chacun, libre de courir après chacune de ses amours,
Restait l'inconditionnel prisonnier de sa liberté de l'autre.

A courir trop de lièvres,
Chacun de se retrouver
Gros-jean-comme-devant,
Le soir, lové sur un divan,
Sans lèvres à embrasser,
Que celles de celle qu’il prétendait aimer
Tout en pensées pour celle qu’il voulait aimer.

©2008 Marwan Elkhoury

Sunday, 7 September 2008

L’ennui

J’aime rester de longues heures sans rien faire
À regarder passer des passants sans âges,
Si différents et si tellement les mêmes visages, 
Et, à mesure qu’ils passent, à mesurer que rien ne se passe.

Les jours passent, les nuits passent
Sans rien, ni autour ni entre, qui ne se passe.
Au cours de ces journées folles d’ennui,
De longs dimanches qui n’en finissent plus,
Je m’enfonce dans une léthargie sans fin
Pour étaler mon ennui sur toutes ces pages.

Je passe le plus clair de mon temps à le perdre
Pour gagner le plus de temps à le perdre
Plutôt que de perdre mon temps à le gagner.

Ennui et paresse, père et mère de tous les vices,
Sont les deux mamelles de ma vie
Qui me nourrissent de rêves et de délices.

Quand on n’a qu’une vie, l’enjeu est de taille.
Faut-il passer à la perdre ou à la gagner.
De toute manière, s’il fallait la passer,
Ça ne serait pas ici où j’aimerais la passer,
Mais ailleurs, toujours ailleurs, et pas sur cette paille.

©2008 Marwan Elkhoury

Les cris et l’écrit

Oserai-je t’appeler amie,
Alors que tu ne m’appelles même pas.
Oserai-je t’appeler alors que tu ne m’appelles pas.
À défaut de t’appeler, je t’écris.

Tout écrit est un cri,
Un cri sourd,
Un cri lourd,
Un cri.

L’échec du cri est l’écrit,
L’échec de l’écrit est le cri interné,
L’échec du cri interné est écriture interieure,
Et l’échec de l’échec est l’échec et mat.

Cri de désespoir de n’être pas écouté,
Dont l’espoir n’est que l’espoir d’un désespoir d’être écouté,
Au mieux le désespoir d’un espoir de ne pas être écouté.

Je t’appelle alors sans t’appeler,
Pour que tu ne m’appelles plus sans m’appeler.
Je t’écris, poussé
Par ce besoin animal ou sentimental de parler
Plus que de te parler,
Parler dans un désert de foules silencieuses et muettes,
Ne communiquant plus que par palimpsestes
Dont la trace se perd dans des tables célestes.

J’écris, plus pour écrire que pour dire.
Je n’ai rien à dire. Encore faut-il le dire
Pour que tout le monde le sache.
En même temps que je contemple toute l’absurdité de ce cri,
Je me refuse à ce qu’il m’empêche ni de le faire ni de le dire.
Ceci est cela. A cela, aucun ne peut y échapper
En faisant comme si ça ne l’était pas.

©2008 Marwan Elkhoury

C'est dimanche


L’autre jour, tout innocemment, je m’écriais:
Tous les jours que dieu crée je crée”.
Aujourd’hui, c’est le jour du seigneur.
Je voudrais pouvoir chanter
Un hymne à sa gloire et à celle des pêcheurs
Que nous sommes mais je n’y arrive pas.
Ni les mots ni les inspirations ne sont
Au rendez-vous de ce jour sans gloire.

Il se fait que depuis quelques temps déjà,
Passent les temps sans que la création ne se passe.
Suis-je en train de faire ce que dieu fait ou ne suis-je plus
En train de le suivre dans ses multiples créations
Et ses non moins quotidiennes destructions.
Crée-t-il encore ou ne crée-t-il plus
Suis-je le fruit de son produit ou un fruit pourri
Et stérile tombé de l’arbre de la création
Ou émanant de celui de la destruction.
Mais tous les fruits,
les frais, les verts, les bannis
Et les pourris sont pour toujours ses fruits.

Comment le saurais-je, si je ne crée plus
Comment saurais-je, si c’est lui en moi qui ne crée plus
Ou moi en lui qui ne crée plus
Pour le savoir, encore faudrait-il le lui demander
Et si je le lui demandais, m’entendrait-il
Et s’il m’entendait, me répondrait-il
Et s’il me répondait, le comprendrais-je
Dîtes-moi, pourquoi devrait-il m’entendre
Et pourquoi devrait-il me répondre
Et pourquoi devrais-je le comprendre.

Pour ce faire, il faut y croire car sans y croire pas de réponse.
Sur ces questions, le doute n’est pas permis.
Il peut même être puni.
Je suis puni, non pas juste pour douter,
Mais pour supposer le doute sans avoir même douté.
Je suis puni et incapable de goûter
Aux joies et aux supplices de la création,
Malaxant des mots sur une page sans passion 
Qui ne font que noircir un esprit déjà bien noir.
Laissons passer ce jour. On verra bien demain,
Quand son heure de gloire sera passée,
Que m’auront réservé mes heures passées.

©2008 Marwan Elkhoury